By Grzegorz Wiśniewski, Ph.D. Economy
Depuis 2015, le gouvernement Hongrois a commencé à investir de façon massive dans l’éducation, notamment en matière de d’éducation tertiaire (université). Ces investissements, qui comptent pour beaucoup dans le budget hongrois, indiquent une démarche que Blue Europe juge favorable, notamment en matière de développement de compétences techniques avancées. Le dernier GPS OCDE de l’éducation montre de très bons résultats, en particulier dans les écoles professionnelles et l’enseignement secondaire, grâce à la moyenne annuelle de 2,1 % d’investissement net du PIB dans l’éducation.
Le rapport Q2 2018 de la Commission Européenne présente justement en matière d’éducation des perspectives économiques légèrement positives pour Hongrie. Ces investissements et la croissance économique sont alimentés par les fonds de l’UE, qui représentent environ 3 % du PIB annuel sur la période 2014-2018 et 43 % des investissements publics.
Plus récemment, la Banque d’investissement européenne a débloqué un pret de 150M d’euros pour permettre une modernisation des infrastructures des écoles primaires. Le prêt de la BEI facilitera la création de nouvelles capacités dans l’enseignement primaire et secondaire et permettra en particulier aux élèves actuellement scolarisés dans des conteneurs mobiles d’emménager dans de nouveaux bâtiments scolaires modernes ; les investissements augmenteront les possibilités sociales et l’employabilité future des enfants. L’accès à des infrastructures sportives modernes contribuera également à améliorer la santé publique en Hongrie en permettant aux jeunes Hongrois de satisfaire aux exigences du programme scolaire national en matière d’éducation sportive et de pratiquer des sports populaires. Ce choix apparemment original est en vérité un symbole de l’alignement du système éducation hongrois vers le système allemand, du moins pour la partie éducation, qui produit parmi les meilleurs résultats en matière d’efficacité chrono-biologique.
En fin de compte, l’une des réussites du gouvernement hongrois réside dans la progression dans les classements internationaux des universités hongroises qui, il y a quelques années encore, se situaient au niveau de certains pays moins développés. Récemment, l’université Semmelweis est parvenue à se classer à la 318e place du classement mondial, après avoir fait un bond de 61 places par rapport à l’année dernière. La plupart de ses succès sont dus au domaine de la recherche, dont les deux tiers sont liés aux soins cliniques aux patients. En septembre dernier, lors de l’ouverture de l’année scolaire à l’Université de Pécs, József Bódis, secrétaire d’État à l’enseignement supérieur, à l’innovation et à la formation professionnelle au ministère de l’innovation et de la technologie, a indiqué que neuf universités hongroises figurent dans les cinq premiers pour cent de la liste du Times Higher Education, et que les établissements hongrois sont parmi les plus performants dans l’espace européen.
La Hongrie ne part pourtant pas d’une situation favorable. Dans un rapport OCDE et UE de 2015, les analystes du système d’éducation en Hongrie déploraient un déclin, certes très relatif, du niveau moyen de l’éducation en Hongrie par rapport aux années d’avants, déclin qui faisait que les performances des étudiants et élèves hongrois étaient à peine en dessous de la moyenne OCDE. Les critiques s’étaient principalement concentrées sur l’enseignement supérieur, car la proportion des 25-34 ans ayant au moins un diplôme de l’enseignement secondaire supérieur (87 %) était déjà supérieure à la moyenne de l’OCDE (83 %) alors que la même population ayant un diplôme de l’enseignement supérieur en Hongrie était de 32 %, soit 9 points de pourcentage de moins que la moyenne de l’OCDE (41 %) en 2014. Pour les nouvelles générations, cette tendance a pratiquement disparu.
Si les progrès sont pour la plupart évidents, tout n’est pas parfait dans l’enseignement hongrois. Dans le rapport sur le semestre européen 2018 pour la Hongrie, on trouve la conclusion selon laquelle la relation entre le milieu socio-économique des élèves et leurs résultats scolaires est la plus forte de l’UE. Le rapport confirme également certaines conclusions antérieures de l’OCDE, à savoir que la formation professionnelle offre une formation pratique sur le lieu de travail mais comporte un contenu éducatif général limité, nécessaire pour préparer les jeunes à un accès direct au marché du travail. Dans l’ensemble, la qualité est faible et la formation professionnelle est devenue la voie d’éducation par défaut pour les enfants issus de milieux socio-économiques défavorisés.
Investir dans l’avenir du pays
Cette investissement massif de la part du gouvernement Fidesz se veut également comme un outil de participation des jeunes dans la politique générale du pays. En effet, le parti au Pouvoir a décidé d’agir durablement pour faire entrer les jeunes dans la politique, à commencer par ses propres rangs. Le Fidesz est pourtant un parti relativement peu populaire parmi les jeunes, chiffres à l’appui : le Fidesz, aux élections législatives de 2018 et municipales de 2019, a été le parti le moins voté par les électeurs appartenant à la tranche d’âge des 18-30 ans, dont il a obtenu respectivement 37 % et 25 % des voix.
Ce que la presse hongroise a appelé la “cure de jouvence” du Fidesz, ou stratégie de conquête de la jeunesse, a commencé à être mise en œuvre au second semestre de l’année dernière. Et cette stratégie marche, autant d’un point de vue politique que social. Momentum et Jobbik sont les partis politiques les plus présents dans les universités hongroises, en termes d’associations, d’organisations et d’activisme, voient leur duopole commencer à subir une pression croissante de la part du Fidesz. C’est le cas, par exemple, du Mathias Corvinum Collegium, dont la réputation d’incubateur historique d’activistes et d’hommes politiques a incité le parti au pouvoir à investir “des milliards de forints […] ces derniers mois” dans cette structure. Le contexte de cette pluie d’argent, essentiellement envoyé sous forme de dons, est la nomination de Balazs Orban, secrétaire d’État au cabinet du Premier ministre, comme président du comité directeur du collège, qui a eu lieu en juillet dernier.
Cette cure de jouvence pourrait fonctionner car, selon Istvan Tozsa, éminent géographe de l’université Corvinus de Budapest, le peuple magyar a tendance à être conservateur et “la résistance des étudiants provient d’un manque de connaissances et d’une susceptibilité à la manipulation”. Fidesz, selon Tozsa, “n’a pas perdu les jeunes, qui ont seulement besoin de grandir”.
En tout cas, au-delà des raisons politiques de l’action du Fidesz, que Blue Europe ne juge pas en vertu de notre politique de neutralité, l’éducation en Hongrie ne peut voir que des jours meilleurs.
Semmelweis University jumps 61 places in Times Higher Education ranking